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Lupin : dans l'ombre d'Arsène

Une série de George Kay

Par Mathieu Victor-Pujebet

          Suite à l’explosion de l’utilisation des plateformes de vod et surtout de Svod (Netflix, Amazon Prime et tous leurs petits copains), la France a décidé de contraindre ces services américains de puiser dans un certain nombre de leurs revenus sur notre territoire (20 à 25% a été annoncé fin 2020) pour produire et racheter des créations françaises sur les terres hexagonales et à l’étranger. C’est dans ce contexte qu’a été réalisé la série Gaumont, diffusée par Netflix : Lupin : dans l’ombre d’Arsène. Créée par Georges Kay et librement adaptée des nouvelles de Maurice Leblanc, les cinq premiers épisodes sont disponibles depuis le 8 Janvier sur la plateforme, en attendant ceux qui les suivront courant 2021.

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     L’histoire est celle d’Assane Diop (Omar Sy), un gentleman cambrioleur qui va tenter de venger son père décédé en prison suite à une terrible injustice…

Pas vraiment une adaptation de l’univers de l’auteur français, Lupin est une transposition de son esprit et de sa grammaire narrative dans un Paris du XXIème siècle. Le personnage principal n’est donc pas ici Arsène Lupin en tant que tel, mais Assane Diop, un homme qui a grandi et appris l’art du gentleman cambrioleur en lisant les textes de Maurice Leblanc. L’œuvre originale est par conséquent utilisée ici comme fondation à un récit ponctué par quelques clins d’œil à la mythologie construite par les nouvelles. Ces références parcourent la série à travers différents enjeux qui font penser à ceux des aventures du célèbre cambrioleur, ou encore avec des personnages qui vont puiser dans les textes de Leblanc pour y trouver des réponses, comme un héritage qui vient tisser des liens entre les générations, ou servir d’indices pour résoudre des énigmes. Une partie de l’intérêt de la série réside dans l’utilisation de cette matière première, non comme du fan service ou des références élitistes, mais pas comme un regard amoureux, ludique et accessible sur les textes de Leblanc, quand bien même le spectateur ne les aurait jamais lus.

     Et au-delà de la relecture pleine d'admiration de la mythologie d’Arsène Lupin, la série emporte le spectateur avec un certain sens du récit, notamment à travers une intrigue aux enjeux solides et aux personnages assez séduisants. En effet, en mettant constamment à jour ses enjeux et en épousant avec assez de malice et d’intelligence la forme de la série : ces cinq épisodes imposent un rythme narratif effréné qui renouvelle perpétuellement l’intérêt du spectateur, quand bien même son tempo soutenu fait parfois tomber Lupin dans la précipitation. Il en est de même pour ses personnages, qui, sans être révolutionnaire de composition ni de complexité, réussissent à être développés avec une efficacité et une joliesse assez belle et convaincante. En témoigne le personnage de Ludivine Sagnier qui entretient une relation très pure et solaire avec notre protagoniste principal, la rendant ainsi éminemment attachante.

     Cependant, si Lupin est un divertissement envolé, il ne reste pas moins sans défaut, loin de là. La faute à une mise en scène, celle de Louis Letterier et Marcela Said, tantôt trop fonctionnelle, tantôt au trait un peu grossier. Cette épaisseur se retrouve également dans l'écriture qui, malgré la gestion assez généreuse des enjeux de manière générale, échoue à aller au bout de ses quelques ambitions thématiques. En effet, en retranscrivant les textes de Maurice Leblanc, Georges Kay et ses scénaristes ont également décidé d’en renouveler les enjeux sociaux en insistant sur l’invisibilité collective des minorités et sur la vantardise des bourgeois. Idée séduisante sur le papier, mais dont l’instance dans son application rend le traitement plus qu’indigeste, notamment durant un premier épisode qui s'illustre de lourdeur et de maladresse.

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           La première partie de Lupin : dans l’ombre d’Arsène est donc un objet plutôt généreux et solaire, quand bien même son sens du récit est parfois piétiné par une confusion entre efficacité et précipitation, par une mise en scène qui manque de corps et de personnalité, et finalement par une lourdeur thématique qui cantonne la série au divertissement, tandis que ses ambitions pouvaient l’emmener plus loin.

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Scope 35 chroniquera la fin de la saison quand celle-ci sera publiée sur Netflix durant l’année.

 

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Une série de Georges Kay

Réalisé par Louis Leterrier (épisodes 1, 2 et 3) et Marcela Said (épisodes 4 et 5)

Ecrit par George Kay, François UzanFlorent MeyerTigran RosineMarie Roussin, d'après l’œuvre de Maurice Leblanc

Avec Omar Sy, Ludivine Sagnier, Clotide Hesme et Hervé Pierre

Produit par Gaumont Télévision

Durée de cette première partie : 225min environ (45min×5)

Sortie le 8 Janvier 2021 sur Netflix

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