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His House

Un film de Remi Weekes

Par Mathieu Victor-Pujebet

          Après un passage remarqué au festival de Sundance, le premier long métrage de Remi Weekes His House bénéficie enfin d’une sortie sur Netflix pendant la période d’Halloween. C’est donc d’une opportunité en or pour toucher un large public dont bénéficie ce film d’horreur britannique qui, malgré quelques coquilles, a d’évidentes ambitions thématiques et esthétiques.

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     L’histoire est celle de Bol (Sope Dirisu) et Rial (Wunmi Mosaku), un couple de réfugié soudanais qui se voit attribué un logement social à son arrivé à Londres. Leur intégration va se voir compromise lorsqu’une suite d’évènements étranges vient les terrifier et remuer un passé douloureux au sein même de ce logement social.

     La visée thématique du film est donc assez transparente : mettre en image et donner à voir la difficulté du déracinement et la violence de la ghettoïsation. Le long métrage de Remi Weekes s’inscrit donc dans une certaine veine sociale du cinéma de genre en tentant de représenter la dualité des réfugiés de guerre entre les efforts d’intégration et la peur de l’oubli, de soi et de ses racines. Et là où le geste de Weekes est assez intéressant s’est dans la façon avec laquelle il réussit à matérialiser ces enjeux thématiques et dramatiques par le biais d’idées de spatialisation assez passionnantes. Il y aura donc nécessairement une attention toute particulière au filmage des lieux, de l’espace qui encadre les protagonistes de façon à en donner à voir aux spectateurs l’agressivité, la rigidité ou l’âpreté. Les rues de la banlieue londonienne deviennent alors des labyrinthes menaçants et les salles d’attentes du centre de réfugiés un espace clinique inquiétant. Cette appropriation de l’espace prend par ailleurs une proportion d’autant plus intéressante et poétique avec évidemment la fameuse maison confiée "généreusement" aux personnages principaux. En effet, ce bâtiment va tout autant être investi et persécuté par les esprits et les traumas du passé que le couple soundanais, Weekes s’amusant ainsi à faire écho aux films de maisons hantés troquant au manoir gothique, un logement social en piteux état. Les portes ouvrent donc ici sur des souvenirs, les fenêtres sur des rêves et les murs renferment culpabilité et esprits qui ne demandent qu’à ressurgir. C’est par ce jeu assez malin d’évocation et de métaphore que le film de Remi Weekes arrive à éveiller l’intérêt du spectateur, dommage que le cinéaste ait du mal à étendre cette curiosité à un morceau d’horreur et de cinéma complètement passionnant et captivant.

     Parce que si quelques bonnes idées surgissent de cette notion de spatialisation, le bât blesse alors dans la tentative de donner corps à cette menace à travers des segments horrifiques ici trop mécaniques et systématiques. En effet, le filmage, le découpage et l’agencement général mis à disposition par le cinéaste pour développer une horreur tangible, bien que symbolique et intime, a du mal à prendre vie, faute à des dispositifs la plupart du temps déjà vus et programmatiques. Notons l’exception du climax plus organique et gorasse, qui reste comme la rare séquence d’horreur assez excitante et marquante du film. Il est également assez regrettable de noter la fragilité avec laquelle Weekes installe un univers fantastique qui manque lui aussi beaucoup de chaire, de matérialité.

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          Ce sont donc quelques visions poétiques et évocatrices qui viennent intéresser le spectateur qui regrette quant à lui que le film ne soit pas plus porté et envolé par une mise en scène plus généreuse et radicale, voire, sans mauvais jeu de mot, plus habitée de manière générale.

 

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Réalisé par Remi Weekes

Ecrit par Remi Weekes, d'après l'histoire de Felicity Evans et Toby Venables

Avec Wunmi Mosaku, Sope Dirisu et Matt Smith

Produit par BBC FilmsNew Regency Productions, Starchild Pictures et Vertigo Entertainment

Durée : 93min

Sortie le 30 Octobre sur Netflix

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