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Julie (en 12 chapitres)
Un film de Joachim Trier

Par Mathieu Victor-Pujebet

Sensibilité d'un regard

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           Après avoir été révélé sur la scène internationale avec Oslo, 31 août, puis réalisé son premier long-métrage en langue anglaise avec Back Home et son premier film de genre avec Thelma, Joachim Trier revient avec un drame lumineux dans sa ville favorite d’Oslo : Julie (en 12 chapitres).

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     L’histoire est celle de la jeune trentenaire Julie et de ses errances amoureuses, de ses hésitations, de ses expériences et de ses choix…

     À l’instar des créations précédentes de Joachim Trier, Julie (en 12 chapitres) est un long-métrage qui fait corps avec sa protagoniste principale. Solaire, fin, tendre, mais aussi traversé par de profonds instants de mélancolie : en écoutant son personnage et en en épousant l’énergie et les sensations, le cinéaste réussit à tisser un portrait sensible et bouleversant d’une femme et de ses enjeux personnels. À travers ces douze chapitres, le film explore des situations plus ou moins quotidiennes, plus ou moins drôles ou graves et plus ou moins terre à terre ou fantasmées, et ce avec une finesse et une expressivité qui évite tout systématisme dans l’écriture ou la mise en scène. Le tempo du film est alors en phase avec celui de son personnage, la durée des segments variant autour d’un élément clé propre à chacun d’entre eux. En effet, le scénario de Joachim Trier et Eskil Vogt ne se construit pas tant sur une progression dramaturgique qui aboutirait à un éventuel accomplissement de sa protagoniste, que sur un aboutement d’instants qui viennent chacun cristalliser une émotion et/ou une idée à travers un épisode de la vie de celle-ci. Cette fragmentation du récit et cet assèchement des enjeux dramatiques, tous deux doublés par l'acuité et la tendresse de la mise en scène, permettent de se concentrer sur le sensible et de toucher à une émotion d’une rare pureté dans le portrait de cette femme et de ses questionnements.

     Et pour cause, le film de Joachim Trier se concentre également sur des problématiques diverses et complexes, tantôt éminemment universelles, tantôt beaucoup plus contemporaines. Il sera ainsi exploré le (non)désire de la maternité et la versatilité du sentiment amoureux, en passant par le rapport au désir à l’air du MeToo, au féminin à travers les âges ou encore à la cancel culture. Cependant, la grande pertinence de Julie (en 12 chapitres) est de ne jamais tomber dans le tract ou dans l’objet trop théorique : chez Joachim Trier, le sensible prime toujours sur la thèse. Ainsi, ces questionnements et réflexions vont croiser la route de Julie, au rythme de ses rencontres et expériences, et seront toujours traités à l’échelle de son personnage, les rendant éminemment intimes, et donc, d’autant plus nécessaires aux yeux du spectateur.

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          Julie (en 12 chapitres) est ainsi une collection d’instants tours à tours réjouissants, intéressants, bouleversants, mais toujours sensibles et d’une grâce infinie.

 

Titre original : Verdens verste menneske (en français : Le pire être humain du monde)

Réalisé par Joachim Trier

Ecrit par Eskil Vogt et Joachim Trier

Avec Renate Reinsve, Anders Danielsen Lie et Herbert Nordrum

Produit par Oslo Pictures, MK Productions, Film I Väst, Snowglobe Films, B-Reel, Arte France Cinema

Durée : 128 min

Sortie le 13 octobre 2021 au cinéma

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