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Zack Snyder's Justice League

Un film de Zack Snyder

Par Mathieu Victor-Pujebet

          Dans la lignée de sa saga adaptée de l’univers des comics DC et produite par la Warner Bros, Zack Snyder débute le tournage de son troisième long-métrage autour de Batman, Superman, Wonder Woman en 2016 : Justice League, suite directe de Man of Steel (2013) et Batman vs Superman (2016). Cependant, après moultes retournements, dont notamment le suicide de sa fille, le cinéaste quitte le projet en cours de post-production et la Warner décide d’appeler le réalisateur Joss Whedon (Buffy contre les vampires, Avengers, Avengers : l’Ère d’Ultron) pour finaliser le montage et diriger les reshoots. Le film sort en 2017, et la majorité des spectateurs restent éminemment déçus et attristés par le résultat final, au point de se manifester pendant plus de trois ans avant que la Warner annonce la mise en chantier d’une version fleuve du film, chapotée par le cinéaste d’origine, avec pas plus de 30 minutes sur 4h de long-métrage appartenant à la version sortie en 2017 : presque un nouveau film, donc. C’est ainsi que quatre ans, 200 000 tweets, et 70 millions de dollars après la première version de Justice League, la Snyder’s cut finit enfin sur les écrans du monde entier : pour le meilleur, mais surtout pour le pire…

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     L’histoire est donc la même que celle du film de 2017 : après les évènements de Batman vs Superman, l’homme chauve-souris décide de réunir une équipe d’individus aux aptitudes extraordinaires pour se préparer à l’arrivée d’une menace qui les dépasse…

     Cinéaste au style identifiable, Zack Snyder avait réussi, avec Man of Steel et Batman vs Superman, à mettre son sens de l’iconisation au service de l’ampleur du récit qu’il voulait porter à l’écran. Ralentis majestueux, contreplongées impériales et effets visuels débordants : certes les films péchaient parfois par leur manque de finesse, néanmoins Snyder avait réussi à développer, à travers tout cet arsenal plastique, un sens du grandiose qui seyaient parfaitement à l’aspect mythologique de son récit super-héroïque. Cependant, dans la Snyder’s cut, les ralentis abondent et l’omniprésence des tentatives d’iconisation font s’effondrer la sensation de gigantisme du film au point que même le changement de ratio, qui aurait pu lui donner une ampleur inédite, s’ajoute bêtement à la liste des ambitions de grandeur déçues du long-métrage. Ce re-montage/re-film impressionne ainsi par son manque d’équilibre et de gradation qui fait que l’immense fresque promise sonne plus comme un embarras étiré.

     Ce problème d’ampleur de la mise en scène fait également écho aux creux de rythme du film qui peine à habiter ses quatre heures de métrage à cause d’une structure difforme qui met l’accent sur des segments plutôt anodins mais reste évasif sur de véritables points forts du récit. Le problème n’est alors pas que la narration et la mise en scène s’attardent sur l’intimité des personnages mais que cette intimité n’intéresse pas le cinéaste et qu’il ne la traite jamais comme telle, mais finalement comme du maigre remplissage. Cette Snyder’s cut ne trouve ainsi jamais réellement son rythme ni ses personnages, ces derniers finissant d’achever le film en l’empêchant de réellement développer son sujet, à savoir : que signifie la mort d’un dieu ? quel monde laisse-t-il derrière lui ? qu’implique son retour ?

     L’ampleur du sujet de Snyder – qui n’était que la continuité de celui de Batman vs Superman – semble ainsi délaissée au service d’une déambulation laborieuse qui accumule les personnages sans chairs, quand ils ne sont pas carrément des fantômes qui auraient été développés dans d’éventuelles suites qui n’auront pas lieux. En témoigne le personnage de Darkseid, grand vilain dans l’ombre, dont l’ensemble du mystère lui a été ôté par simple envie d’en montrer plus, en ayant conscience qu’il ne réapparaitra certainement plus jamais sur nos écrans. Snyder et son scénariste Chris Terrio n’arrivent ainsi jamais réellement à tisser leur univers avec cohérence et minutie à travers un long-métrage trop conscient de lui-même, faisant finalement de cette Snyder’s cut un non-film suicidaire qui ne gère plus son non-dit mais l’expose dans un feu d’artifice indigent et mortuaire.

         

          Extrapolation vomitive du style de son cinéaste et cérémonie nécrophile à la gloire d’un univers mort : Zack Snyder’s Justice League est la preuve définitive du manque de distance de son cinéaste sur son œuvre, que ce soit par joie extatique d’aboutir à son film-fleuve tant fantasmé, ou par urgence d’en finir… Il ne nous reste plus qu’à espérer que Zack Snyder ait définitivement tourné la page DC, pour qu’il puisse une fois pour toute enterrer les morts, et passer à autre chose…

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Réalisé par Zack Snyder

Ecrit par Chris Terrio d'après une histoire de Chris Terrio, Will Beall et Zack Snyder

Avec Ben Affleck, Henry Cavill et Gal Gadot

Produit par DC Films, Access / Dune Entertainment, Atlas Entertainment, et The Stone Quarry

Durée : 242min

Sortie vod depuis le 18 mars 2021 (en achat digital)

Sortie vod depuis le 31 avril 2021 (à la location)

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