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West Side Story
Un film de Steven Spielberg

Par Corentin Burguiere

Le rêve américain

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          Trois ans après le succès public ainsi que critique de son Ready Player One, Steven Spielberg s’attaque à un genre inédit dans sa filmographie avec une adaptation de la célèbre comédie musicale des années 60 : West Side Story.

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     Dans les paysages en pleine métamorphose du New York des années 50, deux gangs rivaux se livrent une guerre identitaire et de territoire : les « Jets » américains et les « Sharks » portoricains. C’est dans ce décor que se noue un amour impossible entre Tony et Maria.

     Dès son annonce, ce remake s’annonçait comme une promesse, et cela à plusieurs niveaux. Premièrement, l’assurance de retrouver une patte cinématographique reconnaissable et aisément identifiable d’un des réalisateurs les plus plébiscités par le public. La seconde, celle de la réinterprétation moderne d’un film immensément culte. Le premier pari est entièrement réussi et la « Spielberg Touch » est au rendez-vous tout au long du film. On prend plaisir à se replonger dans ce cinéma s’attardant sur les visages, les mouvements, le rapport au décor, le rythme du montage et surtout le raffinement de la mise en scène. Celle-ci est extrêmement minutieuse et se soucie tant du détail, qu’elle nécessite au minimum un second visionnage pour en saisir toutes les subtilités. Que ce soit dans la bande sonore, dans le choix des costumes ou des accessoires, tout est millimétré. C’est dans cette exigence que nous apparaît le génie du réalisateur qui s’acharne à donner une profondeur au moindre mètre carré passant dans le champ de sa caméra. On peut cependant contester son utilité de refaire un film déjà entré au Panthéon du cinéma international et des Oscars, où il avait raflé 10 statuettes l’année de sa sortie.

     Si les textes des chansons n’ont pas été retravaillés, cette nouvelle version nous offre de nouvelles scènes de danse d’une très belle intensité. Chorégraphiés tantôt à grande échelle, tantôt dans le dépouillement le plus total, les personnages interagissent de manière intelligente entre eux ainsi qu’avec le décor en dessinant les différents rapports de force. Le moindre espace devient terrain de jeu et moyen d’expression. L’ordre des séquences et la chronologie de certains événements ont, eux, été modifiés par rapport à l’œuvre originale. Un choix plutôt mélioratif qui permet au réalisateur de varier ses décors, là où le film de 1960 centrait la majorité de ses actions dans la rue, de nuit.  Le même constat positif s’applique aux personnages qui, dans l’ensemble, paraissent moins manichéens et plus complexes dans leur personnalité. Il est aussi très appréciable que le film marque de véritables ruptures entre deux scènes de danse et de chant. Cela les rend à la fois plus rares, et plus impactantes.

     Steven Spielberg apporte surtout une appréciable touche de noirceur à ce récit. La violence s’y trouve crue, parfois dure, donnant un côté plus mature à l’œuvre. Cela s’inscrit dans la démarche de Spielberg de créer un effet de réalisme, loin du côté très métaphorique et la mise en scène théâtrale des scènes de violence du premier film. Cette modernisation de l’œuvre originale se ressent également dans certaines répliques et thématiques abordées ainsi que dans certains personnages. On peut citer notamment le fait de caster un acteur transgenre pour le rôle d’Anybodys. Une démarche qui plaira sans doute à certains spectateurs, même si cette touche de démagogie n’apporte pas grand-chose à ce personnage de second plan. Pour continuer sur le casting, en tant que fan de la version originale, Spielberg offre le très beau personnage de Valentina à l’actrice Rita Moreno, ancienne interprète d’Anita, oscarisée pour ce rôle en 1961. Un personnage sur mesure qui s’intègre parfaitement à l’histoire et fait un clin d’œil aux amateurs de la version originale. Pour le reste, on assiste notamment aux premiers pas au cinéma de Rachel Zegler en Maria, qui parvient sans encombre à se glisser dans le rôle, malgré un air parfois trop ingénu. Son association à Ansel Elgort fonctionne et nous fait croire aisément à leur belle alchimie. Mention spéciale également à Ariana DeBose, qui excelle en Anita..

 

           En résumé, West Side Story emprunte à son prédécesseur sa structure, sa couleur et ses beaux personnages, sans jamais renier et en y ajoutant une part de modernité. La technique irréprochable vient soutenir le tout et ravira les puristes comme les novices, dans un film qui a tout pour faire consensus, autant dans sa forme que dans son fond.

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Réalisé par Steven Spielberg
Écrit par Tony Kushner
Avec Ansel Elgort, Rachel Zegler
Produit par 20th Century Studios
Durée 2h28
Sortie le 8 Décembre 2021

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