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Lucky Strike

Un film de Yong-Hoon Kim

Par Antoine Barillet

          Le cataclysme Parasite aura montré à la planète entière la vivacité et la maîtrise autant dans formelle que scénaristique que propose le cinéma Sud-Coréen. Pourtant, cela fait déjà de nombreuses années que la France rencontre la joie de voir sortir des films de ce petit pays avec notamment Old Boy et Mademoiselle de Park Chan-Wook, Burning de Lee Chang-Dong ou les films de Bong Joon Ho pour ne citer qu’eux. Au vu des incroyables réussites – chefs-d’œuvre ? – cités, l’arrivée d’un premier film Sud-Coréen ne pouvait que nous donner l’eau à la bouche. Malheureusement avec Lucky Strike, Yong-hoon Kim ne réalise pas un sans-faute comme beaucoup de ces prédécesseurs Sud-Coréens.

 

     Lucky Strike raconte l’histoire d’un employé de sauna, une hôtesse et une tenancière de bar, un douanier et un préteur sur gage que le destin va faire se croiser autour d’un gros sac de billets. Tous les coups sont alors permis pour obtenir le pactole.

Yong-hoon Kim met donc en scène plusieurs personnages relativement ordinaires et caricaturaux (sauf celui de Yeon-Hee, la tenancière du bar à hôtesses, un métier souvent représenté par des hommes au cinéma) et agence les différentes scènes comme un immense kaléidoscope. Cette structure en puzzle est à la fois un point positif et négatif : en empruntant la construction d’un Pulp fiction, le film devient complètement divertissant et intrigue le spectateur. Scénaristiquement très bien mise en place, cette construction est suffisamment subtile pour que le spectateur s’en rende compte vers la moitié du film et donne naissance à une bonne surprise. Néanmoins, la structure laisse le spectateur dans le brouillard pendant presque la première heure du film en enchaînant les scènes, passant d’un personnage à un autre, d’une intrigue à une autre, empêchant le spectateur de s’attacher aux personnages. De cette structure ressort un goût de déjà-vu accentué par une intrigue principale qui manque cruellement d’originalité. Les ressorts dramatiques mis en place pendant la première moitié du film sont insipides et leurs conclusions bien trop prévisibles une fois que le spectateur à compris la structure du film (on sait rapidement qui va mourir, qui va trahir et qui va survivre).

Si l’histoire reste bateau mais pas des moins déplaisantes, l’intérêt du film repose surtout dans sa forme stylistique impeccable. Le réalisateur s’amuse avec les focales de caméra, il construit ses plans de manière minutieuse et joue avec les couleurs pour nous faire traverser plusieurs ambiances.

On ressent dans la réalisation impeccable de Yong-hoon Kim l’envie de jongler entre plusieurs registres passant du polar noir à la farce. Si dans la globalité du film cette diversité des genres est cohérente, elle n’est néanmoins pas assez poussée, penchant trop mollement vers le polar sombre pour être suffisamment méchante et trop faiblement vers la comédie pour que l’humour noir ne prenne. En cela, le film devient alors assez plat et sans intensité malgré un dernier quart qui accélère le rythme pour proposer des scènes méchamment jubilatoires et très drôles (Tae-Young malencontreusement écrasé par un camion poubelle alors qu’il était voué à se faire tuer par l’homme de main du préteur sur gage).

 

          En ressort alors un film méchamment-gentil, ni suffisamment méchant, ni suffisamment gentil pour offrir de l’intensité aux ressorts dramatiques et relativement déjà-vu. Le film n’est cependant pas des moins divertissants, parfois très drôle (si on est friand d’humour noir) et surtout réalisé avec perfection. Malgré un manque d’originalité, Lucky Strike démontre une fois de plus le talent qu’on les réalisateurs Sud-Coréens à mettre en scène leurs films.

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Réalisé par Yong-Hoon Kim

Ecrit par Yong-Hoon Kim (d'après l'oeuvre de Keisuke Sone)

Avec Jeon Do-Yeon, Woo-Sung Jung, Song-Woo Bae, Yuh-Jung Youn et Man-Sik Jeong

Produit par Megabox

Durée : 1h48

Sortie le 8 Juillet 2020

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